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A lire dans Métropolitiques, l'article de Mathilde Mouton sur la production de logement abordable en Afrique de l'Ouest : ici.

 

Extraits :

Si des solutions existent pour surmonter ces difficultés – accompagner la création d’aménageurs, instituer des mécanismes de captation de la plus-value foncière et/ou mobiliser la parafiscalité pour financer l’aménagement des sites, favoriser la montée en compétences des promoteurs et développer des filières de production de matériaux locaux pour optimiser les coûts de construction locaux, etc. – leur mise en place ne peut se faire que sur la durée, et reste insuffisante pour satisfaire les besoins de l’ensemble de la population, dont une bonne partie demeure exclue du recours à l’emprunt bancaire, et ce malgré les mesures de soutien déployées.

Permettre l’accès du plus grand nombre à un logement décent nécessite donc de diversifier les approches et de penser des solutions complémentaires inspirées des pratiques en vigueur dans l’économie informelle. L’autoconstruction hors des normes officielles est en effet le processus de fabrique urbaine dominant dans la plupart des villes africaines. Si ce modèle présente de nombreuses fragilités, il est aujourd’hui le seul qui permette aux ménages non bancarisés d’étaler leurs dépenses dans le temps, donc d’accéder à la propriété. Il présente également l’avantage de permettre une certaine évolutivité des logements, largement plébiscitée par les ménages, et de s’appuyer sur une multitude de petits entrepreneurs locaux (petits investisseurs, entreprises de construction, artisans, tâcherons, etc.), plutôt que sur quelques promoteurs souvent détenus par des capitaux étrangers.

Ainsi, il ressort des études conduites in situ par l’autrice que les États gagneraient à capitaliser sur les forces de ce modèle pour accélérer la production de logements véritablement abordables, tout en s’attaquant à ses fragilités, à savoir l’informalité, la qualité inégale des constructions et le manque de financement. Cela pourrait se faire :

  • en accompagnant l’autoconstruction incrémentale sur des terrains ouverts à l’urbanisation assortis de titres fonciers, et selon des normes définies conjointement avec l’État  ;
  • en formant les entrepreneurs locaux aux techniques de construction agréées par l’État et en accompagnant le développement des filières de production nécessaires à leur déploiement à large échelle (équipements, matériaux, etc.) ;
  • en mettant en place des mécanismes de financement adaptés à la faiblesse et à l’irrégularité des revenus, inspirés des pratiques actuelles d’épargne et de financement communautaire, comme le financement de fonds rotatif ou l’octroi de prêts à des groupes d’épargne faisant office d’intermédiaire entre les ménages et les institutions bancaires), le refinancement d’institutions de microfinance, ou encore la mise en place de prêts incrémentaux versés par tranche au fur et à mesure de l’avancement des travaux, comme le proposent des organismes comme iBuild Homeloans en Afrique du Sud ou ZambiaHomeloans en Zambie.

 

Outre le plaisir de retrouver des images d'opérations au Sénégal et en Côte d'Ivoire sur lesquelles nous avons travaillé ensemble (ici), la force de l'article tient à la capacité à prendre du recul sur les modèles d'aménagement, et à proposer des pistes pour leur adaptation aux réalités locales. Certaines caractéristiques des projets d'urbanisation évoqués (comme leur dimension incrémentale) pourrait aussi sans doute inspirer certaines pratiques d'aménagement en France (on en reparlera - à propos de l'hybridation des modes opératoires entre l'opération d'ensemble et le diffus).

 

 

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