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A lire : la très stimulante et nécessaire newsletter de 15marches sur la gratuité et les transports publics : ici.

Extraits :

Depuis 1993 et la Loi Sapin, la concurrence dans l’attribution des marchés s’est développée. Elle a porté sur la qualité de service, un peu sur la productivité (mais jamais au détriment de l’emploi), et donc essentiellement sur la capacité à générer des recettes supplémentaires. C’est la raison du succès de la “délégation de service public à la française” : l’opérateur y est fortement incité à aller chercher de nouveaux clients et à les garder, parce que de l’atteinte de ces objectifs dépend une part conséquente de sa rémunération. Quand je travaillais chez Keolis, les recettes commerciales se chiffraient à 750 millions d’€. On doit avoir dépassé le milliard depuis. Ce modèle incite l’opérateur à investir dans des études, du savoir-faire, des technologies,… pour obtenir des marchés. Cet alignement des intérêts – celui des organisateurs, des opérateurs et des voyageurs – est très vertueux. Il développe une culture intéressante dans les entreprises locales : le client doit être respecté parce qu’il est un client du service public, mais également parce qu’il contribue au financement du personnel, du matériel et des infrastructures.

Avec la renégociation des contrats, cet édifice patiemment bâti dans les entreprises, qu’elles soient indépendantes ou dans des groupes, risque de se fissurer. À quoi bon maintenir des compétences et financer l’innovation centrée sur le client si personne ne vous le demande ? Sur quoi vont se jouer les prochains appels d’offres ? Y aura-t-il seulement des candidats, si la mise en concurrence ne porte que sur les coûts ?

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À l’inverse, les pure players du numérique utilisent le smartphone comme point d’entrée unique de leurs services, en faisant un véritable assistant de mobilité. Ils utilisent à plein le potentiel de localisation, d’interactions et de réassurance du smartphone. Toutes les fonctions “pénibles” (s’identifier, se localiser, être en règle, payer, être alerté) sont assurées en tâche de fond.

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Un autre modèle du web pourrait nous inspirer : le freemium.

Souvent complémentaire du premier, il fonctionne de la manière suivante : l’utilisateur bénéficie d’un accès gratuit (ou via des bons d’achat, des crédits, une promotion temporaire,…) à certaines fonctions basiques. Les adeptes des jeux vidéos le savent : l’objectif est de vous permettre d’aller suffisamment loin pour prendre goût au service, puis au moment idéal on vous demande de payer pour continuer et/ou améliorer votre expérience. Ce modèle a beaucoup de vertu, car il impose de bien prendre en compte la valeur du service pour l’utilisateur et de privilégier sa rétention. Tout faire pour qu’il utilise de plus en plus le service au point qu’une fois convaincu, il acceptera de payer son usage. Nous avons là un “alignement des astres” intéressant pour le transport public.

Pour que le modèle donne tout son potentiel il faudrait presque que les périodes de pointe soient réservées aux abonnés (ou imposent un tarif élevé), tandis que les périodes creuses seraient gratuites. En effet l’expérience est plus agréable en période creuse, ce qui permettrait de faire découvrir facilement et à moindre coût le service. L’effort marketing et commercial pourrait se concentrer sur la “transformation” de ces voyageurs occasionnels en voyageurs réguliers payants (les e-commerçants parlent de “conversion”, tout un symbole). Rappelons qu’actuellement c’est plutôt l’inverse : voyager en période creuse coûte plus cher que voyager en période de pointe. La “corbeille” de l’option payante pourrait également être garnie en y incluant par exemple les services numériques, des facilités de paiement, un coaching personnalisé, une offre de places assises et de services premium comme une location de voitures…À vous de jouer !

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Sur ces questions passionnantes, on signale nos précédents billets ou travaux, par exemple :

Les villes au défi de la gratuité : note pour le Réseau National des Aménageurs

Gratuité des transports en commun, péages urbains et gilets jaunes

Ville gratuite ? Ville freemium ?

et aussi notre Etude sur les nouveaux modèles économiques urbains, réalisée avec Espelia et Partie Prenante. Teasing : la prochaine publication sortira la semaine prochaine avec une partie consacrée à la ville Freemium...

Et notre article dans Futuribles d'avril 2015 : La ville restera-t-elle gratuite ?

 

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