Le trottoir, nouvel eldorado de la smart-city ?

La Gazette des communes revient dans un bel article sur l’évènement “Le trottoir, espace de plug & play de la smart-city”, organisé lundi 25 novembre dernier par la Fabrique de la Cité.

 

Que l’on parle de candélabres intelligents, équipés de caméras de vidéoprotection, de véhicules en freefloating, de tout ce qui court dessous comme les réseaux électriques ou de gaz, et bientôt du déploiement de la 5G… Tous ces services de la smart city se matérialisent sous, sur et au-dessus des trottoirs. Cet espace cristallise en effet un certain nombre de représentations, voire de fantasmes, autour de la ville du futur, a-t-on entendu à la Fabrique de la Cité, un think tank dédié à la prospective urbaine, créé par le groupe Vinci, qui accueillait lundi 25 novembre une conférence dédié à ce sujet.

« Le trottoir est un objet pertinent pour interroger le devenir et le déploiement spatial du numérique dans l’espace urbain », comme l’a fait remarquer Raphaël Languillon, chargé d’études senior à La Fabrique de la Cité. Ce qui conduit même une partie de la sphère privée à estimer que les collectivités seraient assises sur un actif financier, longtemps perçu négativement, mais désormais stratégique qu’elles pourraient (devraient ?) monétiser.

Pour comprendre les multiples enjeux que recouvre aujourd’hui le trottoir, il faut s’intéresser de près à la bordure de trottoir, cet espace intermédiaire entre la chaussée et le trottoir, dite « curb » en anglais. « Cette approche connaît même une importance accrue en Amérique du nord avec le curb management », explique Isabelle Baraud-Serfaty, maîtresse de conférences à Sciences Po Paris et présidente de Ibicity, qui invite à « repenser la valeur de la bordure de trottoir, vue comme une source de coût par beaucoup de collectivités, et qui devient aujourd’hui un actif stratégique ».

Car si le trottoir est devenu l’espace privilégié du déploiement du numérique en Europe, comme espace de « plug and play » (branchement et fonctionnement) de la smart city, c’est qu’il est « le moins cher » (contrairement à un bâtiment privé auquel il faudrait verser une rente, par exemple), et « le moins impactant » sur le fonctionnement de la ville, comme le précise Alain Guillaume, responsable développement et marketing chez Omexom (marque de Vinci).

« On n’y a pas réfléchi tout de suite. On était axé déplacements, données, comme si la donnée allait s’affranchir des infrastructures et tout résoudre. L’équation réside peut-être dans cette infrastructure intelligente, structurante pour la mobilité », pointe Emmanuel Mussault, directeur du programme « smart city » chez Michelin.

Il accompagne en effet le déploiement de nombreux nouveaux usages dans des champs très divers de la smart city : surveillance, micromobilités… Et invite aussi à réfléchir à des pratiques éphémères : comme par exemple « le branchement provisoire sur l’espace public, via des prises sorties du sol facilement, le temps d’un concert ou d’un autre événement culturel par exemple », expose Nicolas Machtou, directeur délégué Île-de-France chez Enédis France.

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Source : “Le trottoir, nouvel eldorado de la smart-city ?” – Laura Fernandez Rodriguez – LaGazette.fr – 27 novembre 2019

 

A lire également dans Cadre de ville de ce mardi 3 décembre notre interview en trois questions sur le sujet.

Extrait :

Les usages de la trottinette dans l’espace public ont récemment mis sur le devant de la scène la question du trottoir et de son évolution. Quelle est son histoire dans la fabrique de la ville ? Pourquoi cet espace public spécifique doit-il faire l’objet d’études précises ?

Le trottoir est un objet récent et peu étudié dans la fabrique de la ville. Il en existait à Pompéi, mais, ensuite, ils disparaissent complètement du paysage urbain, jusqu’à leur réapparition à Londres suite à l’incendie de 1666. A Paris, les premiers trottoirs apparaissent à la fin du XVIIIe siècle, mais leur généralisation date du milieu de XIXe siècle, et coïncide alors avec la construction des égouts, des réseaux de gaz, d’eau ou de tubes pneumatiques. Ces travaux seront réalisés tout au long du XIXe siècle, notamment lors de la transformation de la capitale par Haussmann. La création et le développement du trottoir ont ainsi posé les bases de la ville des infrastructures, modèle dominant de structuration urbaine jusqu’au début du XXIe siècle.

(…)

Existe-t-il des solutions concrètes mises en place sur ces problématiques ?

En Amérique du Nord, un certain nombre de villes, comme Seattle, sont en pointe sur ces questions. En France, ce sujet qui émerge tout juste doit être mis à l’agenda des collectivités. Il est paradoxal que les villes voient le trottoir comme une source de coût, coûteux à fabriquer et à gérer, alors que c’est leur actif le plus stratégique. Ceci dit, la prise de conscience de ces enjeux commence à avoir lieu. Je participe au réseau de veille prospective du Grand Lyon. Certains travaux ou dispositifs s’inscrivent dans cette logique. Une récente étude de l’Atelier parisien d’urbanisme porte ainsi sur les “évolutions des usages de la bande stationnement”. Par ailleurs, dans une tribune récente (ici) consacrée à la logistique, Jean-Louis Missika, adjoint à la Mairie de Paris chargé de l’urbanisme, propose un système de réservation pour les places de livraison. Il introduit ainsi la notion d’allocation en temps réel de ces espaces publics, et pose les jalons d’une première politique en France de “curb management”.

La suite est à lire sur le site de Cadre de ville : ici.

Source : “Isabelle Baraud-Serfaty : “Le trottoir est l’actif urbain le plus stratégique pour les villes”” – Cadre de ville – 3 décembre 2019.